Programme du colloque « Dire “Je” dans un monde qui met hors-jeu : la construction du sujet dans un contexte hostile » – 10-12 avril 2019, Port au Prince, Haïti

Port-au-Prince, du 10 au 12 avril 2019

Hôtel le Plaza, 10 Rue Capois

 

PROGRAMME

(version téléchargeable:  cliquer ici)

 

Mercredi 10 Avril 2019

9h-9h30                   Inscription / Accueil des participants

 9h30-10h                 Ouverture du colloque

Mots de bienvenue des organisateurs et présentation du colloque

Allocution du représentant du Conseil du laboratoire LADIREP

Allocution du responsable de l’Axe 1 du laboratoire LADIREP

Allocution du Coordonnateur de la FASCH

Allocution du Vice-recteur à la Recherche de l’UEH

10h-12h                   Conférence d’ouverture (Salle Thérèse)

  • Vincent de Gaulejac, Professeur émérite à l’université Paris Diderot-Paris 7; président du Réseau international de sociologie clinique.

Dire « je » dans un monde hostile : les apports de la sociologie clinique

Discutant : Michèle D. Pierre-Louis, présidente de la Fondation Connaissance et Liberté-FOKAL

12h-13h20              Pause

13h30-15h30          Dispositif de recherches et accès aux terrains difficiles (Salle Thérèse)

  • Chaïb Benaïssa, Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales /IRIS ; Dialogue About Radicalisation and Equality

Quelques enjeux et problèmes autour de la relation du chercheur à un terrain difficile

  • Raynold Billy, Université Libre de Bruxelles/CeSCuP ; Université d’Etat d’Haïti/LADIREP ; Unité psychosociologique de recherche et d’intervention clinique

Le RSP: un modèle d’intervention socio-clinique en milieu hostile

  • Djenane Marlhen Jean Charles, psychologue, Unité psychosociologique de recherche et d’intervention clinique

Le RSP comme support à la mise en récit de soi : L’expérience de quelques jeunes de Cite de Dieu avec ce dispositif.

  • Yoanne Dewitte et Johan Chupin, intervenants sociaux, RISC

La sociologie clinique : un outil de combat syndical à La Poste

                                Animation : Alain Jean, Université d’Etat d’Haïti

 15h45-17h45          Clinique du sujet et hostilité du milieu (Salle Thérèse 1)

  • Jean Gérard  Clervil, psychologue, écrivain

L’autre jeu du  »Je » hors-jeu, échec et péril du  »nous »

  • Louisa Baralonga, Université Paris Diderot-Paris 7/LCSP

Transmission des psychosociologies d’orientation clinique en France : fragilités des alliances entre fondateurs et héritiers dans une association de professionnels

Animation : Josué Vaval, Université d’Etat d’Haïti

            Penser le sujet, penser le contexte (Salle Thérèse 2)

  • Jean-Baptiste Joseph, travailleur social

Appauvrissement de l’État, ONG et sujet mis en danger

  • Evenson Lizaire, Université d’Etat d’Haïti/LADIREP ; Unité psychosociologique de recherche et d’intervention clinique

Figuration du sujet chantant : entre ostentation, lamentation et engagement

  • Elyamine Settoul, Maitre de conférences au CNAM

Des malaises d’être français et musulmans après Charlie Hebdo

Animation : Cliford Marseille, Université d’Etat d’Haïti

 

Jeudi 11 Avril 2019

9h30-10h                Accueil des participants

10h-12h                  Espace public, pouvoir politique et religion (Salle Thérèse)

  • Anne-Cécile Caseau,  Université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis/ LEGS

Injonction à l’opinion ? De la participation à un projet radiophonique à la construction d’une subjectivité́ politique chez des jeunes femmes roms

  • Réginaldo Louis-Jeune, Université Paris 2 Panthéon Assas

De l’infrapolitique à l’antipolitique, canevas pour une compréhension de la subjectivation politique en Haïti

  • Wilson Jean Baptiste, Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines/Printemps

De l’analyse de la subjectivation politique à travers les réseaux sociaux. Le cas des Pétrochallengers.

  • Kepler Aurélien, Université Paris Diderot-Paris 7/LCSP ; Unité psychosociologique de recherche et d’intervention clinique

Mise en sens laïque de la religiosité dans les rapports au pouvoir d’Etat. Le cas de l’appropriation des héritages de la théologie de la libération par les sujets du mouvement populaire haïtien.

Animation : Marc-Félix Civil, Université d’Etat d’Haïti

12h-13h20              Pause

13h30-15h              Violence, genre et responsabilité parentale (Salle Thérèse 1)

  • Marie Lafortune Joseph, psychologue, psychothérapeute

La solitude du “je” en milieu hostile

  • David Jean Simon, Université Paris 1-Panthéon-Sorbonne

La violence subie par les adolescentes enceintes dans l’aire métropolitaine de Port-au-Prince

  • Aurélien Sharma, militante féministe, Ecoles des Hautes Etudes en Sciences Sociales

Difficultés de transformation des litiges chez les femmes haïtiennes des classes populaires dans les procès de garde des enfants et de pension alimentaire

                       Animation : Delphine Vincenot, Université Paris Diderot

Mémoire collective et engagement politique (Salle Thérèse 2)

  • Jerry Michel, Université d’Etat d’Haïti/LADIREP ; Université Paris 8 Vincennes Saint-Denis

La construction de la mémoire collective à la croisée de la reconnaissance et de la subjectivation en Haïti

  • Louisa Baralonga, Université Paris Diderot-Paris 7/LCSP

Analyse clinique d’un engagement antiraciste dans le contexte post-colonial français : l’éducation des jeunes et imaginaire colonial

  • Jocelyn Belfort : Université Paris 8 Vincennes Saint-Denis/CEMTI

Petrochallengers, du mur à la rue: une analyse de l’impact des réseaux sociaux sur la mobilisation populaire en Haïti

Animation : Marc Désir, Université d’Etat d’Haïti

15h15-17h15          Genre, sexualité et précarité (Salle Thérèse 1)

  • Angeline Dorzil, Université Paris 13/TTN

Les jeunes femmes et les lieux de sexualité: Accès limités aux espaces de réalisation du “je” sexuel en Haïti

  • Rose-Myrlie Joseph (vidéo-conférence), Université Paris Diderot-Paris 7/LCSP

Fanm ak FANMi, les femmes haïtiennes et la généalogie

  • Mokhtari Naima, Université Abderrahmane Mira Bejaia/Laboratoire interdisciplinaire santé et population

Le phénomène de la prostitution en Algérie et l’accessibilité au terrain d’étude

Animation : Mislor Dexai, Université d’Etat d’Haïti, LADIREP

Milieu carcéral et insécurité (Salle Thérèse 2)

  • Lourdes Stéphane Alix, psychologue, chercheure indépendante

Jeunes et Polices à Saint-Michel : l’intervention dans le cadre d’une recherche-action

  • René Badache, Sociologue clinicien, comédien intervenant/Compagnie ACTIF

Dire « jeux » dans un monde hostile. Le jeu par le rôle : l’expérience en prison

  • Boson Ramilus, Université Lumière ; Université publique du Sud-Est à Jacmel

Comment dire « Je » en étant hors-jeux derrière les murs d’une prison ?

Animation : Jean Mozart Féron, Université d’Etat d’Haït

 

Vendredi 12 Avril 2019

9h30-10h                Accueil des participants

10h-12h                  Expériences migratoires, projets et construction de soi (Salle Thérèse 1)

  • Francoeur Jean-François, Université d’Etat d’Haïti/FASCH

La migration : déracinement, désillusions et espoirs

  • Julien Bodeler, Université Paris Diderot-Paris 7

Expériences migratoires : du « mode de croire » à la question de carrières dans la migration haïtienne.

  • Dimitri Béchacq, Chargé de Recherche au CNRS, Laboratoire Caribéen de Sciences Sociales/Université des Antilles

Être Haïtien/Haïtienne en Guadeloupe. Ce que la migration fait au sujet

  • Joseph Arcelin Carmil, Université de Bordeaux/Passages

Se construire en diaspora: des sentiments d’appartenance de la descendance haïtienne en France

Animation : Lukinson Jean, Université d’Etat d’Haïti, LADIREP

Atelier de théâtre forum (sur inscription au préalable)

René Badache, Sociologue clinicien, comédien intervenant/Compagnie ACTIF

12h-13h20              Pause

13h30-15h30          Quartiers populaires, violence et arts de faire (Salle Thérèse)

  • Djems Olivier : Université Paris 8 Vincennes-Saint-Denis/Ladyss

Violences et insécurité: Vers un besoin de protection

  • Michèle D. Pierre-Louis, présidente de la Fondation Connaissance et Liberté-FOKAL

Espace public, conscience de soi et pulsion citoyenne

  • Ghislaine Joseph, Université Paris Descartes/PHILéPOL

Jeunes de « quartiers populaires » à Port-au-Prince : de la catégorisation affichée à une réflexivité́ juvénile

  • Bengie Alcimé, Université Paris Diderot-Paris 7/LCSP ; Unité psychosociologique de recherche et d’intervention clinique

Habiter un lieu précaire : la débrouille pour faire avec et faire sans

                                Animation : Jean Waddimir Gustinvil, Université d’Etat d’Haïti, LADIREP

15h45-17h45          Travail, subjectivité et hostilité du milieu (Salle Thérèse)

  • Thomas Périlleux, Université Catholique de Louvain/CriDIS

Libérer le silence dans des contextes de travail hostiles

  • Louisa Baralonga, Université Paris Diderot-Paris 7/LCSP

Evaluer les apprentissages socioéducatifs de futurs travailleurs sociaux dans un contexte d’universitarisation des organismes de formation

  • Wilsot Louis, Université Paris Diderot-Paris 7/LCSP

Penser le travail en situation « humanitaire » en Haïti : les pratiques managériales dans la définition des compétences dans les ONG

  • Vincent de Gaulejac, université Paris Diderot-Paris 7; RISC

De la difficulté d’être sujet dans des organisations paradoxales

Animation :    Odonel Pierre-Louis, Université d’Etat d’Haïti, LADIREP

Bengie Alcimé, Université Paris Diderot

 

ARGUMENTAIRE

La sociologie clinique met au cœur de son approche théorique, épistémique et méthodologique la question du sujet. Celui-ci est pensé comme un être soumis à des déterminismes tant psychiques que sociaux mais avec la capacité d’intervenir sur ce qui le détermine. Il n’est pas un donné mais advient au détour d’un processus où, prenant conscience de ce qui l’agit, il cherche à s’en dégager, à devenir sujet de sa vie. Il est sans cesse pris entre son assujettissement aux structures sociales et son désir de désassujettissement, entre ce qu’on a fait de lui et ce qu’il fait de ce qu’on a fait de lui. La sociologie clinique appelle ainsi à éviter à la fois le piège de la toute puissance du sujet, et l’illusion du tout social qui nie toute capacité d’action (de Gaulejac, 1987, 2009). Si la subjectivation est toujours un défi, comment se construit-elle dans les contextes particuliers faits de grande hostilité sociale ? Comment la précarité socioéconomique ou politique influence-t-elle les capacités du sujet ? Celui-ci est-il condamné à résister sans pouvoir transformer les situations sociales particulièrement agressives ? Ce colloque analyse, dans leur intrication, les obstacles à la construction du sujet et les tentatives de celui-ci pour advenir quand-même. Quatre axes d’étude sont envisagés.

Axe 1. Clinique du sujet et hostilité du contexte

Comment penser le sujet en milieu hostile? A quelles conditions est-il possible d’advenir comme sujet quand on est confronté à un monde qui sans cesse tente de mettre l’individu hors-jeu (Jean-François, 2011)? Il s’agit ici d’analyser les formes que revêtent l’autonomie et la réflexivité individuelles dans les contextes de grande précarité ou de banalisation de la violence, afin de comprendre ce qui, à la fois de la psyché et du social, enclenche la subjectivation. Comment se déroule la socialisation dans des situations de fragilisation des sociabilités quotidiennes ? Comment l’individu se construit-il au carrefour de ses différentes identifications, celles issues de son milieu mais aussi d’un monde globalisé dont il fait partie? Comment articuler l’individuel et le collectif ?

Axe 2. Subjectivation et politique

Penser les transformations des individus dans des contextes de précarité, de violence, de domination, suppose d’examiner de près les rapports des individus aux institutions, et notamment l’institution politique. Car la possibilité pour les individus de faire valoir une autonomie – ne serait-ce que minimale – face à la représentation que d’eux leur renvoient les structures de domination, dépend étroitement de la place que la politique accorde à l’autonomie individuelle ; autrement dit, de la place que l’individu occupe, en tant que sujet de droits et devoirs, dans le système politique. Quels rapports les sujets de droits et les citoyen-ne-s développent-ils avec la politique quand l’environnement social n’est pas sécurisant ? En quoi l’autonomie et la réflexivité qu’ils cherchent à construire dans leur vie quotidienne rejaillissent-elles sur leur rapport au politique ? En quoi sont-elles au principe de l’imagination de nouveaux modes d’accès au politique, y compris imaginaires ou utopiques ? En plus des pratiques de résistance à la domination, de subversion des normes, d’imagination utopique, cet axe concerne aussi, et surtout, les luttes sociales, dans un contexte, spécifique aux pays postcoloniaux, d’ONGisation et de professionnalisation des mouvements sociaux (Falquet, 2008). Il accorde une attention particulière à l’imbrication des transformations individuelles, subjectives et psychiques et de l’émergence de nouveaux collectifs politiques, réels ou virtuels, porteurs de nouveaux « torts » (Rancière). Pour toutes ces raisons, cet axe fait dialoguer la sociologie clinique avec une sociologie de l’individu et de la subjectivité (Tarragoni, 2018).

Axe 3. Clinique des rapports sociaux et problèmes sociaux

A travers cet axe, il s’agit de questionner les rapports sociaux et leur expression concrète dans le vécu des individus, dans les situations de vulnérabilité psychique et sociale. On propose d’analyser ces rapports dans une perspective intersectionnelle où rapports sociaux de sexe, de sexualité, de classe, de race, d’âge, ainsi que les confrontations Nord/Sud ou urbain/rural, sont mobilisés dans leur intrication pour comprendre les phénomènes étudiés. Comment cette articulation des rapports sociaux influence-t-elle la construction des sujets face à des phénomènes comme le travail/emploi, la migration, l’éducation, la religion, la santé, le handicap, la parentalité, la sexualité, la violence… ?

Axe 4. Méthodologie de la recherche en terrain difficile

Cet axe entend analyser la production du savoir à partir des terrains difficiles. Quels outils utiliser, et quelles adaptations méthodologiques imposent-ils? Comment travailler la co-construction de la connaissance entre chercheur-e et enquêté-e quand les individus, pris dans le quotidien, sont confrontés à des difficultés ? Comment fonctionne la relation de recherche, et qu’en est-il de l’implication du-de la chercheur-e? Comment expliciter, objectiver et restituer les transferts et les contre-transferts, surtout quand les chercheur-e-s eux-elles-mêmes vivent des situations limites? Quel type de connaissance est produite à partir de ces contextes de recherche ? Cet axe considère par ailleurs l’impact des rapports sociaux sur le point de vue des chercheur-e-s ou des personnes interrogées, et sur la connaissance produite dans cette interrelation (Joseph, 2013, 2017). Il fait appel à des travaux réflexifs sur les recherches en milieu hostile, en Haïti ou à l’étranger.

Bibliographie

FALQUET, Jules. 2008. De gré ou de force : Les femmes dans la mondialisation. Paris : La dispute.

GAULEJAC (de), Vincent. 1987. La névrose de classe : trajectoire sociale et conflit d’identité. Paris : Hommes et groupes éditeurs.

GAULEJAC (de), Vincent. 2009. Qui est “je” ? : Sociologie clinique du sujet. Paris : Seuil.

JN-FRANCOIS, Lenz. 2011. Comment devenir « je »dans un monde qui vous met hors-jeu ? : Le défi de la construction d’un individu – sujet chez les jeunes du Bel-Air (Port au Prince, Haïti) de 1986 à 2006. Thèse de doctorat (sociologie) dirigée par Vincent de Gaulejac. Université Paris Diderot – Paris 7.

JOSEPH, Rose-Myrlie. 2013. « Implication dans la recherche : des points communs aux points de rencontre », in Vincent de Gaulejac et al., La recherche clinique en sciences sociales. Toulouse : ERES « Sociologie clinique ». Pp. 133-150.

JOSEPH, Rose-Myrlie. 2017. « ‪De l’invisibilisation des travailleuses domestiques haïtiennes‪ », in Journal des anthropologues, 2017/3 (n° 150-151). Pp. 85-105.

TARRAGONI, Federico. 2018. Sociologies de l’individu, Paris : La Découverte, coll. « Repères », 2018.

Comité scientifique

Dimitri Béchacq (CNRS), Marie-Anne Dujarier (LCSP), Michèle Duvivier Pierre-Louis (Fokal), Jules Falquet (LCSP), Vincent de Gaulejac (RISC, LCSP), Lenz Jean-François (UEH, LADIREP), Rose-Myrlie Joseph (LCSP), Maud Laëthier (URMIS), Ana Massa (RISC), Christophe Niewiadomski (RISC), Lise Poirier Courbet (RISC).

 

Comité d’organisation

Réseau International de Sociologie Clinique (RISC)

Vincent de Gaulejac.

Laboratoire de Changement Social et Politique (LCSP – Université Paris Diderot- Paris 7)

Rose-Myrlie Joseph.

Université d’Etat d’Haïti (UEH) : Laboratoire Langage Discours et Représentations /Unité Psychosociologie de Recherche et d’Intervention Clinique ( LADIREP/UPRIC) ; Faculté des Sciences Humaines (FASCH)

Raynold Billy, Lenz Jn-François, Djenane Marlhen Jean-Charles.

Association des Haïtien-ne-s de Paris 7 (ASHA-P7)

Bengie Alcimé, Kepler Aurélien, Julien Bodeler, Wilsot Louis, Harry Moïse.

Informations pratiques: voir la page du colloque